Dès l'aube, Frère Jordin et Séraphine, comme à leur habitude, avaient effectué une session de katas lents afin d'étirer leurs muscles et de s'éclaircir l'esprit. On aurait cru voir des gens se mouvant dans l'eau mais avec une parfaite fluidité, bien qu'un peu moins parfaite chez l'apprentie que chez le maître. Chacun de ces mouvements avait une fonction bien précise et pouvait s'avérer décisif voire mortel pour un potentiel adversaire, sous réserve d'être effectué à vitesse normale. Ces exercices avaient donc également pour intérêt de décomposer des techniques martiales sans être gêné par une quelconque précipitation. Répéter le même mouvement tout les matins avait pour résultat de l'ancrer dans la colonne vertébrale du moine, de telle sorte qu'il entre dans le domaine du pur réflexe. La recherche de vitesse relevait ensuite presqu'uniquement du détail.
Une fois la session terminée, les deux moines se débarbouillèrent et descendirent dans la salle afin de prendre un petit-déjeuner léger. Par la fenêtre, ils virent un jeune homme s'exercer à l'épée dans la cour de l'auberge avec une certaine adresse, et Séraphine reconnut le barde qui les avait divertis la veille. Ce métier exigeait de savoir se défendre, mais il était tout de même rare de croiser un troubadour avec une réelle maîtrise martiale.
Séraphine, je vais devoir retourner au Palais de Justice afin de me renseigner sur la quantité de fonds nécessaire pour établir notre école, expliqua Jordin à son apprentie. Cela nous permettra de prendre une décision concernant l'offre de l'aubergiste. En attendant mon retour, tu pourras t'exercer un peu au bâton, cela fait quelques jours que tu n'y as plus touché.
Très bien, Frère. Dois-je m'exercer aux coups portés ou aux techniques de défense ?
Je préférerais que tu travailles les deux. Je serai de retour pour le déjeuner.
Sur ces mots, le moine se leva et se dirigea vers la sortie, puis prit la direction du Palais de Justice.